Max Gérard à la barre du Minerva, un luxmotor (bateau de transport d’origine hollandaise souvent aménagé en logement) de 30 mètres entièrement remis en état par les ateliers d’H2O. Prix de revente annoncé de cette péniche de luxe capable de naviguer en mer : 520 000 euros.

Max Gérard à la barre du Minerva, un luxmotor (bateau de transport d’origine hollandaise souvent aménagé en logement) de 30 mètres entièrement remis en état par les ateliers d’H2O. Prix de revente annoncé de cette péniche de luxe capable de naviguer en mer : 520 000 euros.

Chez les Gérard, la navigation fluviale est une affaire de famille. Sans eux, la gare d’eau de Saint-Jean-de-Losne (à cheval sur la commune de Saint-Usage) ne serait sans doute pas devenue le premier port fluvial de France. L’histoire commence en 1980 quand le patriarche, Charles Gérard, la trentaine, débarque à Saint-Jean-de-Losne pour y créer une société de location de bateaux. Citoyen allemand issu d’une famille française partie s’installer outre-Rhin à l’époque du Premier Empire, le petit Charles a attrapé le virus de la navigation par son grand-père, capitaine du bateau qui le menait chaque année en vacances sur une île de la mer du Nord. Et de le repasser à la génération suivante : « Mes enfants ont passé leur enfance sur des bateaux, ils sont allés dans la plupart des ports de l’Europe à la Nouvelle-Zélande, et ont eu leurs propres embarcations dès leur plus jeune âge. C’était naturel qu’ils me rejoignent pour travailler à Saint-Jean-de-Losne. »

Mais revenons aux années 80 : à l’époque, la ville encaisse plutôt mal l’arrêt de la batellerie commerciale et le port est en pleine déliquescence. Un projet, heureusement resté dans les cartons, prévoit même de bétonner les bassins pour en faire une zone industrielle. Cependant, le tourisme fluvial commence à pointer le bout de son nez, sans qu’aucune infrastructure d’accueil ne lui soit proposée. Après que la municipalité a péniblement installé deux premiers pontons, Charles Gérard fonde en 1987 sa propre société de création et de gestion de ports fluviaux, baptisée H2O.

Trente ans plus tard, la gare d’eau de Saint-Jean peut accueillir plus de 600 bateaux, alors que la société gère trois autres ports de plaisance (dont le tout nouveau Port royal d’Auxonne), employant quelque 120 personnes au total, salariés et sous-traitants réunis. Si Charles est toujours présent au quotidien, la nouvelle génération a déjà pris le relais :  ainsi, son fils Max est désormais responsable de l’administration générale, des ventes et des sites internet de la société ; son neveu Philippe gère la partie atelier, alors que sa fille Jocelyne est en charge de H2Olidays, agence de voyages spécialisée dans le tourisme fluvial, également basée à Saint-Jean-de-Losne. Le tout dans des hangars complètement métamorphosés, dont le fier bardage en bois rouge donne désormais au port côte-d’orien une sympathique allure nordique.

« En trente ans, le port a retrouvé la vie, l’ambiance et la convivialité qu’il avait perdues », estime Max, toujours prêt à partir faire un tour à bord du Gunten, son bateau à passagers suisse de 1893, amarré juste devant l’ancienne maison éclusière où il habite. « Si la marine marchande fait désormais partie du patrimoine local – nous participons d’ailleurs activement à sa préservation –, la plaisance fluviale a encore de beaux jours devant elle, et nous comptons bien en faire profiter Saint-Jean-de-Losne, dans le sillage de notre société. » Il est vrai que H2O est devenue une référence internationale dans le tourisme fluvial, pour la vente et l’entretien des bateaux aussi bien que pour la création de ports proposés clés en main à des collectivités locales. Bon vent moussaillons !