Dijon-Prenois est un circuit de légende. Ses actionnaires misent sur sa dimension patrimoniale pour renouer avec le plus haut niveau sportif mondial et se positionner sur le terrain de l’événementiel. Dans tous les cas de figure, c’est l’économie territoriale qui monte sur la plus haute marche du podium.

Par Thomas Barbier
Photos : Christophe Remondière

C’est au cour d’une partie de chasse à la fin des années 60 que le visionnaire François Chambelland imagine un circuit permanent en plein cœur de la forêt de Prenois. La chose est très rare en Europe à l’époque. Pourtant, le 26 juin 1972, le projet se concrétise avec l’inauguration d’une piste qui deviendra mythique. Elle recevra par la suite les plus belles compétitions automobiles : sport-prototypes, motos, camions et bien sûr le fameux championnat du monde de Formule 1…

Piste nationale suisse

La légende de Prenois est donc en marche. Les fans gardent en mémoire ce 1er juillet 1979, jour du Grand prix de France. Jean-Pierre Jabouille et sa Renault signent la première victoire d’un moteur turbocompressé dans la catégorie reine des sports automobiles. La performance sera pourtant en grande partie éclipsée par l’incroyable mano a mano que se livrent pour la deuxième place Gilles Villeneuve, sur Ferrari, et René Arnoux, sur l’autre Renault. Un combat interminable, roues contre roues, durant plusieurs tours, toujours considéré, 37 ans plus tard, comme la plus belle et chevaleresque passe d’armes de tous les temps en Formule 1.

En 2002, la famille Chambelland passe la main à un groupe d’actionnaires bourguignons tout autant passionnés, bien décidés à permettre au circuit de conserver son indépendance. Une gageure au pays de «  l’auto-phobie  »  chez les institutionnels ? Ce n’est pas l’avis de Yannick Morizot : « Nous avons vite compris que le prestigieux passé du circuit était un atout exceptionnel pour notre développement futur. Nous avions conscience d’être à la tête d’un des plus beaux tracés à travers le monde, mais il nous fallait le mettre aux plus hautes normes de sécurité voulues par la fédération internationale de l’automobile tout en ne dénaturant pas son si respecté tracé »

Une tour de contrôle de 1 250 m 2 flambant neuve, orientée vers le sport, mais aussi l’événementiel. ©Christophe Remondière

Une tour de contrôle de 1 250 m² flambant neuve, orientée vers le sport, mais aussi l’événementiel.

Le rapide et technique « toboggan » côte-d’orien mérite alors de conserver son âme et son charme d’antan, bien loin des pistes nées dans les années 1990 et 2000, souvent trop aseptisées. Un important investissement place cette volonté au cœur d’une stratégie bien réfléchie, qui conduit au succès. Aux premières loges de cette évolution, le président du circuit depuis 2005 confirme : « Le circuit est loué plus de 230 jours par an. De nombreux teams y réalisent leurs essais privés. Ecole de pilotage, clubs automobiles et motocyclistes amateurs, regroupement de gentlemen drivers ou encore associations de sécurité routière y ont leurs habitudes ».

De la simple journée de roulage aux plus grosses manifestations telles que que les Coupes Moto Légende, capables de réunir plus de 30 000 personnes, la pépite économique fédère bien au-delà des frontières de la région : « 95% des clients viennent du reste de la France mais aussi de toute l’Europe ; 60% des pilotes et écuries arrivent d’Allemagne, de Belgique, d’Angleterre, d’Italie, d’Espagne et bien sûr de Suisse ». Les Helvètes, privés de pistes dans leur pays, considèrent en effet Prenois comme leur piste nationale. Un bienfait pour l’économie territoriale, notamment « pour l’industrie hôtelière de notre département qui se priverait de pas moins de 90000 nuitées par an sans le circuit ! »

L’économie sur le podium

On l’aura compris, derrière le monument patrimonial qu’est le circuit de Dijon Prenois, se profile une entreprise en plein développement. Symbole fort de cette évolution, la mise en place d’une nouvelle tour ultra moderne de 1 250 m 2 , construite par pas moins de 30 entreprises locales. « Il nous faut fidéliser nos clients et attirer de nouveaux habitués vers des prestations haut de gamme, annonce Yannick Morizot, le temps était venu de remettre à jour nos structures d’accueil, de renforcer l’efficience de l’organisation. Confort, connexion, praticité, agrément, climatisation, structure médicales, PC de chronométrage : rien n’a été oublié afin d’être en condition de recevoir les plus gros championnats internationaux dont leurs organisateurs se rapprochent de nous ».

Les importants travaux réalisés afin de respecter les normes internationales de sécurité n’ont pas dénaturé le rapide et technique tracé du circuit dijonnais. ©Christophe Remondière

Les importants travaux réalisés afin de respecter les normes internationales de sécurité n’ont pas dénaturé le rapide et technique tracé du circuit dijonnais.

Les dirigeants du circuit en sont légitimement et historiquement convaincus, cette « piste et les infrastructures qui l’accompagnent sont bien plus qu’un équipement dédié aux sports mécaniques. » Soit tout le contraire d’un lieu fermé sur lui-même. Ce circuit est pleinement ouvert à son environnement socio-économique. Le credo est une nouvelle fois porté avec détermination par le patron des lieux : « Aujourd’hui, nous voulons aller encore plus loin dans cette implication territoriale et démontrer aux acteurs économiques locaux tout l’intérêt qu’il y a pour eux à s’appuyer sur une structure telle que la nôtre, à nous utiliser à leur propre profit. L’exemple récent du Grand Prix de l’Age d’Or qui, début juin, a attiré près de 15 000 spectateurs, est de ce point de vue éclairant. Peter Auto nous a choisis pour un de ses événements phares de l’année, cela démontre notre professionnalisme. C’est ce même professionnalisme que nous pouvons mettre au service des entreprises de la région souhaitant bénéficier de l’écho médiatique généré par ce genre de rendez-vous. Notre circuit est un outil formidable en termes de communication et d’image pour nos chefs d’entreprise. Il est générateur de flux d’affaires. »

Dijon-Prenois se donne ainsi les moyens de concourir simultanément dans deux courses : celle du retour au plan mondial sportif, celle aussi d’un nouveau positionnement au cœur de l’événementiel. Dans tous les cas, c’est l’économie territoriale qui monte sur le podium.