ylvie Vénague dans l’abri de ses protégés, en compagnie d’Émeraude, une algapa huacaya (à laine gonflante), fille de la grande chamionne de l’élevage. En cette fin d’été, l’éleveuse rentre chaque soir les mères et leurs nouveaux nés, dont la plupart seront vendus avant de quitter la ferme à l’âge de 6 mois.

Sylvie Vénague dans l’abri de ses protégés, en compagnie d’Émeraude, une algapa huacaya (à laine gonflante),
fille de la grande chamionne de l’élevage. En cette fin d’été, l’éleveuse rentre chaque soir les mères et leurs nouveaux nés, dont la plupart seront vendus avant de quitter la ferme
à l’âge de 6 mois.

Originaire du Nord, Sylvie Vénague a suivi une formation agricole avant de décrocher son premier emploi à la Chambre d’agriculture de Côte-d’Or en tant que chargée de mission Environnement. Rompue à la chose rurale et à la vie de la ferme, elle se découvre une vocation pour l’élevage en même temps qu’une tendresse toute particulière pour le lama et l’alpaga, ces camélidés domestiqués originaires d’Amérique latine (le premier descend du guanaco, le second de la vigogne) à la drôle d’allure de peluche débonnaire.

Dès 2003, notre technicienne agricole passe de l’autre côté des barbelés en montant sa propre exploitation à Tart-le-Bas : l’élevage de la Tille. « Les débuts ont été prometteurs, mais je ne disposais pas d’assez de surface, d’autant que les terrains étaient morcelés et que les bâtiments des animaux se trouvaient à 3 km de mon habitation. » À la recherche d’une exploitation plus vaste, en plaine et pas trop loin de Dijon, la mise en vente par la Safer de 18 hectares sur la commune de Chambeire lui apparait comme une chance unique à saisir de suite : « Quand j’ai vu qu’il y avait 14 candidats sur le coup, je me suis dit que je ne les aurait jamais. Dans une région de grande culture céréalière comme la Beauce, mon élevage exotique aurait immédiatement été rejeté. Ici, en Côte-d’Or, le Département soutient la diversité, et à mon grand étonnement, c’est mon projet qui a été choisi. »

Ainsi, depuis 2008, quelques bâtiments en bois bien intégrés et de drôles de quadrupèdes sont apparus sur les pâturages du village de Chambeire, entre Tille et Saône. Quelque 80 têtes en tout – alpagas suri (toison fine en « dreadlocks ») ou huacaya (toison plus touffue) et lamas mélangés –, auxquelles Sylvie consacre le plus clair de son temps et qui le lui rendent bien. Entre la vente de ses bêtes (qui finiront la plupart du temps comme animal de loisir ou de tonte chez un particulier), le produit de leur laine, mais aussi la ferme pédagogique et le gîte rural qui complètent le dispositif, sa petite entreprise lui permet de vivre décemment de son activité, en accord avec ses aspirations personnelles.

Seule exploitation agricole de Chambeire, l’élevage de la Tille apporte même un peu d’animation à la petite commune rurale où ces étonnants « gros moutons au cou allongé » sont devenues une attraction locale. D’ici quelques siècles, qui sait, l’alpaga de la Tille aura essaimé et sera devenue une nouvelle sous-espèce endémique de Côte-d’Or ?