Avec sa collection Grands Terroirs, la Maison Louis Bouillot valorise le crémant de lieu millésimé, rappelant qu’il y a un siècle, les vins mousseux supplantaient parfois les grands crus. Au sein de La Verrière de Nuits-Saint-Georges, Dijon Capitale a donc dressé une table façon « Belle Époque », avec la talentueuse contribution du duo beaunois qui officie à l’Hostellerie Cèdre & Spa : le chef étoilé Jordan Billan et le chef sommelier Benjamin Maillet.

L’effervescence bourguignonne est une histoire méconnue, sans doute un peu trop vécue à l’ombre de celle de sa voisine plus au nord. Pourtant, il y a plus d’un siècle, nos « mousseux » portaient des noms de grands crus. Ils se vendaient mieux et plus chers que les vins stars « tranquilles » du vignoble bourguignon. Romanée, Chambertin, Montrachet… la valse des pétillants régnait en haut de page des livres de comptes des maisons de vins de l’époque.

L’appellation Crémant de Bourgogne fêtera en 2026 ses 50 années d’existence. Elle a énormément progressé. On n’en fait plus par défaut. Les méthodes d’élevage sont devenues plus exigeantes. On se met donc à penser « terroir » et « millésime ». Un angle que développe sans retenue la gamme Grands Terroirs de la Maison Louis Bouillot, plaçant le climat et l’année de récolte au cœur de l’étiquette. Quitte à laisser de côté la référence « crémant », le temps d’un assouplissement espéré de la réglementation aux mains de l’Inao.

Dans le même temps, les Champenois n’ont jamais autant aspiré à faire des « champagnes de terroir ». En quête d’une identité plus précise, ils évoluent en dehors du seul champ de l’esprit de fête auquel on les résume du point de vue populaire. Au bas de la pyramide, avec ses airs d’Italie et ses prix d’ami, le prosecco s’impose de plus en plus chez les jeunes.

Ambiance Belle Époque

La Bourgogne, « limitée » en production à peu ou prou 20 millions de bouteilles, a donc une fenêtre de tir intéressante pour viser le haut du panier. Dans les années à venir, elle pourrait bousculer le sommet de la hiérarchie d’un monde en pleine effervescence, dans tous les sens du terme. 

La notion de climats lui est exclusive. Associée à celle des années de récolte, si importante au royaume du pinot noir et du chardonnay, elle casse certaines idées reçues sur ce crémant de Bourgogne qu’on renie au profit du champagne, par méconnaissance du sujet, dès qu’il s’agit de célébrer un grand événement. Y compris en Bourgogne. Nul n’est prophète en son pays.

La rédaction de Dijon Capitale a donc décidé de mettre les choses au clair et de sabrer quelques bouteilles de Grands Terroirs en mode « grand siècle ». Dans une ambiance digne de ces repas qui régalaient Toulouse-Lautrec et les sulfureuses héroïnes de la Belle Époque. Le cadre était tout trouvé : la Maison Louis Bouillot et sa verrière restaurée avec goût à Nuits-Saint-Georges, propice aux dégustations les plus délicieuses.

Ne manquait plus qu’un chef et un spécialiste des accords mets et vins pour mettre en musique la proposition. Nous les avons trouvés dans les cuisines de l’Hostellerie Cèdre & Spa à Beaune : l’étoilé Jordan Billan et son chef sommelier Benjamin Maillet. Défi relevé hauts les verres. En trois temps et autant de mouvements. 


Bulles d’approche : langoustine et caviar en 3 assiettes

Cette déclinaison se fait sur la profondeur du chou-fleur, le parfum doux-amer de la fleur de Cazette du Morvan et la légèreté d’un gel de crémant. Un plat subtilement virevoltant, qui se mêle à l’envi dans une crème de pinces, un peu de carcasses en bouillon et une sauce aux herbes. Ça vole très haut dans l’assiette. La structure du blanc de noirs En Bollery 2018 (3150  bouteilles produites), « avec plus de droiture et plus de pureté » analyse le sommelier, est taillée pour la précision d’un produit comme la langoustine. Un véritable plat de fête pour un accord au sommet dans le genre.

Bulles d’échanges : pintade fermière et moutarde

La rusticité apparente de la volaille s’encanaille au contact d’une tartelette aux abats et d’une mythique sauce poulette… au crémant. Après la digne langoustine, notre progression gustative libère les instincts. Tout ceci, franc et généreux, « impose le choix évident du chardonnay », dixit le maître des accords. C’est dans le terroir de Savigny-lès-Beaune que la proposition gaillarde de ce plat trouve sa réponse. Le Chenôvre 2017 (4 044 bouteilles produites), extra brut (donc faiblement dosé en sucres), 100% chardonnay, est convoqué pour tenir la chandelle.

Bulles de promesses : fromage de chèvre cuisiné et miel

Une savoureuse mousse caprine fait les yeux doux au nectar d’abeille. La texture est large, teintée de sucrosité et, en même temps, relevée par une pointe d’acidité. Pour une finale enjouée entre fromage et dessert, il faut de la générosité et de la vinosité. Avec « sa belle ampleur en attaque », la subtilité du terroir de Molesme dans le Châtillonnais, à la frontière de l’Aube, et la pertinence de son assemblage de cépages (70 % pinot noir, 30 % chardonnay), font que le joli Les Lavots 2017 (5659 bouteilles produites) scelle l’union sacrée qui précède le passage à l’acte. Nous n’en dirons pas plus.