Le président Thierry Degorce et la directrice générale Nathalie Voisin font de la JDA une marque à fort rendement. Le frère et la sœur se veulent aussi « créateurs d’émotions ». Leur modèle économique révolutionnaire, tourné autour de la Bourgogne, bouscule les règles du basket professionnel.

26 juin 2021. Dijon n’a pas à rougir de sa finale face à l’Asvel (74-87). La « Jeanne » a le potentiel et le mental d’une future championne de France. L’alignement des planètes n’a jamais été aussi fort pour la JDA et Dijon vibre de tout son cœur. Le basket à haut niveau, en cette ville, est une véritable institution. Laurent Legname, son bouillonnant entraîneur chouchouté par les médias, est salué en héros. La Jeanne, historiquement, c’est la Jeanne d’Arc. Elle est devenue JDA le jour où un journaliste a installé cet acronyme dans les esprits. À croire que l’inconscient collectif se méfie toujours des références historico-religieuses. Derrière la JDA, un couple veille. Un frère et une sœur. Thierry Degorce le président et Nathalie Voisin la directrice générale sont les artisans du bonheur retrouvé de ce vénérable club qui n’a pas toujours connu autant de sérénité.

Pourtant, ni elle ni lui n’ont pratiqué le basket. Ni elle ni lui n’ont d’attaches dijonnaises. Leur lien profond avec la JDA s’est construit sur le terrain, étape après étape, panier après panier. Il est d’ordre entrepreneurial et humain, porté par le goût du challenge. Thierry et Nathalie sont ainsi, complémentaires dans l’âme et dans les actes. Le premier défriche, surfe sur ses instincts, provoque les événements. La deuxième organise, consolide, gère et pérennise.

Redoutable et en même temps sympathique fratrie. Sous son influence, et associée au nom de la Bourgogne, la JDA est devenue une marque, un modèle économique particulier, divisé en sous-groupes qui sont autant de petites entreprises à part entière. Nous y reviendrons. Dijon Capitale a rendu visite à cet inséparable duo, à Beynost (Ain), aux portes de Lyon, au siège de leur société familiale spécialisée dans la maintenance immobilière. ISERBA a été créée en 1978 par le père de Thierry et Nathalie. D’une génération à l’autre, le groupe a connu une évolution spectaculaire et évolue essentiellement sur des contrats passés avec les offices HLM. Dont Orvitis, le principal bailleur social de Côte-d’Or, qui est lui-même en première ligne des partenaires de la JDA.

Le 16 février 2020, la JDA remportait la Leaders Cup à Disneyland Paris. Un premier trophée depuis quatorze ans, avant de terminer, la saison suivante, premier de la saison régulière. Signe que du côté sportif, la JDA est entrée dans une nouvelle ère. © Foxaep

Centres de profit

Les repreneurs du club dijonnais sont donc entrés par la petite porte du club house. Pour se rapprocher d’Orvitis et d’autres partenaires, mais aussi parce que le groupe investit beaucoup dans le sport. La Jeanne offre matière à communiquer des valeurs positives auprès des 1 300 collaborateurs d’ISERBA. Le challenge sportif, le goût de la compétition, la joie des victoires qu’on va chercher avec les dents, sont des signaux plaisants à associer au management. La JDA avait cependant quelques petits problèmes de gouvernance, pour ne pas dire de gestion.
Thierry Degorce en a été très tôt informé. Il avait en lui un profil de sauveur. La présidence du club lui est presque naturellement revenue. Ses qualités de chef d’entreprise visionnaire éclairent désormais le basket dijonnais d’un champ nouveau. Nathalie Voisin, aux premières loges de cette reprise en main, le dit avec franchise : « Le système en place ne répondait pas complètement à nos besoins, en matière commerciale par exemple, nous devons aller au-delà de la simple gestion de fichiers. »

Pendant que le prodigieux meneur américain David Holston émerveille les spectateurs sur le terrain, et que l’équipe dijonnaise brille en Jeep Elite, Thierry Degorce bâtit son projet. Ainsi, JDA Bourgogne devient une holding qui materne ses propres filles : JDA basket, JDA hand, JDA immobilier, JDA communication, JDA restaurants, JDA vins, etc. Chacune de ces branches est un centre de profit, une entreprise à part entière. Simple. Efficace.

Olivier Meillerat et Gaylord Sudan, le directeur de Terre & Mer by La Jeanne et son chef, place de la République à Dijon. Le groupe JDA investit dans différents pôles, y compris celui de la restauration et du vin. © Jean-Luc Petit

Sainte Jeanne

Prenons la branche sport. Après le basket masculin et le hand féminin, deux sports emblématiques dijonnais, le projet JDA s’ouvrira à la création d’une entité ambitieuse pour le basket féminin. Puis l’immobilier. L’acquisition rue Fauconnet d’un immeuble de 13 logements réservés au staff sportif et aux joueurs fait partie d’une émancipation immobilière programmée… avec l’aide de la restauration. Place de la République, la JDA s’offre en effet une table d’affaires, Terre & Mer et une Brasserie République taillée pour les supporters. Un pôle « by La Jeanne » auquel s’ajoutera, près du siège aindinois d’ISERBA, une troisième adresse, Dell’Anima. Quant au vin, cela tombe bien dans une région comme la nôtre, Thierry Degorce s’y montre plus qu’attaché. Après avoir acquis quelques hectares dans le Mâconnais, entre Milly-Lamartine et Pouilly-Fuissé, entre rouge et blanc donc, le néo-vigneron verrait bien ses plantations s’élargir en Côte-d’Or. On lui souhaite bonne chance. Car tout cela rejoint l’ambition d’ouvrir en 2022, un lieu très « sélect » pour les séminaires, près de Cluny, le Moulin des Arbillons.

Le projet JDA Bourgogne est donc bien bourguignon, au sens territorial de son appellation. Il aurait même pu, à un certain moment, intégrer l’Elan Chalon à son périmètre. Mais les tractations n’ont pas abouti. Le mot « Bourgogne » est, quoiqu’il en soit, porteur à l’international. Thierry Degorce et Nathalie Voisin raisonnent aussi en « créateurs d’émotions », avec une stratégie multi compétences autour de cette marque unique. Plus d’une trentaine de salariés, joueurs et cadres sont déjà rassemblés dans cette compétition économique qui se joue autour de l’acronyme JDA. Finalement, les journalistes font parfois bien d’aimer les raccourcis. Que Jeanne d’Arc les pardonne ! —